Leigh Edgar
Autrefois l’un des meneurs de la lutte contre le changement climatique, le gouvernement du Canada tire maintenant de l’arrière par rapport aux autres pays développés sur la question des émissions de gaz à effet de serre. Mais au lieu d’accroître ses efforts, le Canada préfère pointer d’autres nations du doigt.
Les faits
Des preuves du changement climatique ont été relevées partout dans le monde. La fonte des glaces marines de l’Arctique, les changements à la configuration des précipitations, les sécheresses plus nombreuses, l’augmentation de la température des océans et la modification de la disponibilité des aliments pour les espèces migratrices comptent parmi les éléments qui ont motivé le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) à affirmer en 2007 que le changement du système climatique est « sans équivoque », et qu’il est « très probable » que la cause en soit l’activité humaine. Dans les pays développés comme le Canada, l’utilisation des combustibles fossiles est la principale source de gaz à effet de serre. Dans les pays en développement, les émissions proviennent en grande partie du déboisement et des incendies de forêt.
Bien que l’atmosphère nous paraisse infinie, il s’agit en réalité d’une mince couche protectrice qui enveloppe notre planète. L’activité humaine modifie la composition de l’atmosphère, en augmentant la proportion de dioxyde de carbone et de certains autres gaz, ce qui a déjà des conséquences pour notre système climatique.
Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat est un groupe intergouvernemental scientifique apolitique d’experts qui « étudie les recherches effectuées dans le monde, publie régulièrement des rapports d’évaluation et compile des rapports spéciaux et des articles techniques ». Son plus récent rapport d’évaluation, qui remonte à 2007, souligne que pour éviter le pire, il ne faut pas que la température mondiale augmente de plus de 2 °C ou que la concentration de dioxyde de carbone dans l’atmosphère excède les 450 parties par million (elle atteint déjà les 391 ppm). Les conclusions du GIEC ont encouragé, à l’échelle mondiale, l'adoption de protocoles, de mesures et d’objectifs de réduction reposant sur des données scientifiques.
Le Canada comparé
Chaque nation doit participer à la solution; le Canada ne fait pas exception. Tous les pays produisent des émissions de gaz à effet de serre, mais certains en produisent un peu plus que les autres. Pour rendre à César ce qui lui appartient, avouons que l’intensité des émissions canadiennes a diminué, ce qui signifie que nos émissions par unité de production sont en baisse. Cela dit, le volume total de ces émissions continue d’augmenter à cause de l’accroissement de la production, notamment dans l’industrie de l’exportation du pétrole. À l’heure actuelle, le Canada produit plus de gaz à effet de serre par habitant que la Chine ou l’Inde.
Le Canada doit accomplir deux choses :
- réduire ses émissions aux niveaux scientifiquement acceptés et
- aider la faune et la flore à s’adapter; les changements de conditions climatiques ont déjà altéré l’habitat de plusieurs espèces sauvages, et elles ont besoin de notre aide pour survivre.
En ratifiant le Protocole de Kyoto en 2002, le gouvernement du Canada s’est engagé à réduire les émissions de gaz à effet de serre à six pour cent sous les niveaux de 1990 d’ici 2012, à 25 pour cent sous ces niveaux d’ici 2020 et à 80 pour cent d’ici 2050. Malheureusement, nos émissions s’élèvent aujourd’hui à 27 pour cent au-dessus des niveaux de 1990, et l’engagement du gouvernement fédéral est insuffisant selon les meilleures données scientifiques existantes. En fonction du plan du gouvernement fédéral, en 2020, nos émissions seront de 3,6 pour cent inférieures aux niveaux de 1990, et de 51,8 à 63,9 pour cent en 2050. D’autres pays développés, dont l’Allemagne, le Royame-Uni et la France ont déjà atteint leurs objectifs. Comment le gouvernement du Canada peut-il donc affirmer qu’il nous est impossible de réaliser les nôtres ? Malgré les efforts en matière d’efficacité énergétique, les investissements dans la capture et le stockage de CO2 et l’amélioration de l’efficacité des véhicules (à partir de 2011), il est évident que les réductions appliquées au Canada ne sont ni assez amples ni assez prononcées. Pourquoi le gouvernement de Canada croît-il qu’il peut réduire ses objectifs quand le problème nous affecte tous ?
Le Canada est au tout dernier rang sur le plan des mesures contre le changement climatique parmi les pays du G8. Les répercussions (prévues ou déjà ressenties) du changement climatique pour des régions comme les Grands Lacs, les Prairies et l’Arctique, ainsi que leurs industries, devraient suffire à encourager la mise en place d’ambitieux plans de réductions des émissions de gaz à effet de serre et d’adaptation en vue de protéger la nature et ses processus, mais ce n’est pas le cas. Le gouvernement fédéral a déclaré qu’il prenait des mesures d’adaptation et de lutte au changement climatique; malheureusement, ces mesures ne concernent pratiquement pas l’environnement lui-même. Les efforts d’adaptation sont axés presque exclusivement sur les personnes, la propriété, l’infrastructure et la santé humaine. Bien que tout ça soit d’une grande importance, on constate que le rôle fondamental de l’environnement dans le travail, la santé, les loisirs et l’identité est cruellement déprécié.
La FCF encourage le gouvernement fédéral à adopter les mesures suivantes :
- Consacrer un pourcentage des revenus de tout mécanisme du marché du carbone (comme les mesures de plafonnement et échange, si on les impose) à la protection des ressources naturelles.
- Investir dans la préservation et la restauration des aires naturelles, compte tenu du fait que les plantes croissantes et les sols éliminent le dioxyde de carbone de l’atmosphère tout en augmentant la capacité des espèces sauvages à s’adapter.
- Établir des objectifs de réduction en fonction des meilleures données scientifiques existantes confirmées. Il est inacceptable de se baser sur moins.