Bienvenue, 
albatross-chick-parent-bird.jpg

Une diète de détritus


Jul 12, 2018
Bailey Moreton

Comment les déchets marins nuisent-ils à la faune?

Avec le plus long littoral du monde, le Canada est aux premières loges pour témoigner de l’abondante faune marine qui vit le long de ses côtes. Toutefois, les eaux bleues scintillantes sont de plus en plus encombrées de dépotoirs flottants constitués de plastique, de déchets et d’articles de pêche perdus. Ces détritus nuisent aux nombreuses espèces marines qui entrent en contact avec eux.

baleine à fanonsBaleines à fanons

Les baleines à fanons, comme la baleine noire de l’Atlantique Nord, sont particulièrement à risque de consommer des déchets marins. Ils sont des filtreurs et agissent comme des aspirateurs pour se nourrir. Ils ouvrent grand la gueule à la surface de l’eau et attrapent de petits crustacés, mais aussi les détritus marins qui flottent dans leur bouche. Dans une grande gorgée, ils consomment et leurs proies et des ordures.

tortueTortues luths

Les tortues luths occupent aussi des manches près des littoraux. Ces créatures, qui sont gravement menacées à l’échelle de la planète, utilisent les courants océaniques près des littoraux pour migrer au Canada l’été et l’automne. Durant cette période, les eaux canadiennes ont la plus forte densité de tortues luths dans l’Atlantique Nord.

Comme elles se déplacent si près des côtes, ces tortues sont fréquemment en contact avec des détritus marins, comme des sacs en plastique. Selon Sean Brillant, biologiste principal en conservation (mammifères marins) à la Fédération canadienne de la faune, ce problème est répandu chez les tortues de mer : « Des rapports indiquent que la moitié des tortues de mer de la planète montrent des signes d'ingestion de plastique. »

Pour la tortue luth, les sacs en plastique ressemblent aux méduses qui constituent leur principale source de nourriture. Une fois ingérés, les sacs en plastique ne peuvent être régurgités en raison des milliers d’épines qui tapissent le gosier des tortues. Les sacs en plastique sont alors pris dans le système de la tortue et peuvent mener à des insuffisances digestives, à la baisse d’énergie et à la famine.

Les déchets marins ne nuisent pas uniquement aux géants de la mer, mais aux animaux de toute taille. .

Zooplancton

Lorsque les microplastiques pénètrent l’eau, les animaux microscopiques comme le zooplancton peuvent les méprendre pour de la nourriture et les ingérer. Puisque le plancton fait partie de la diète de nombreuses espèces, les chercheurs sont inquiets que les produits chimiques soient transmis dans la chaîne alimentaire et causent des problèmes de santé chez divers animaux.

Poissons, mollusques et crustacés

Un rapport de l’Organisation maritime internationale, un organisme des Nations Unies, a trouvé des preuves de microplastiques dans des poissons, des mollusques et des crustacés qu’on retrouve dans les supermarchés du Canada. Des animaux comme le saumon rouge, le thon blanc, les moules et les huîtres mangent régulièrement du plancton et de petits invertébrés qui consomment des microplastiques. Les plastiques demeurent non seulement dans l’estomac des animaux, mais s’imprègnent dans leur tissu. Ils ne sont donc pas éliminés lorsque les poissons sont vidés.

La pollution plastique ne touche pas que les animaux qui nagent dans les débris, mais ceux qui les survolent aussi.

oiseaux marinsOiseaux marins

Les oiseaux marins volent au-dessus des océans où flottent les détritus, ce qui ne les empêche pas de les consommer. Selon Sean Brilliant, la façon dont chassent les oiseaux marins les rend tout aussi susceptibles d’ingérer des déchets.

« Ils cherchent des objets rouge vif dans l’océan, raison pour laquelle leur estomac est rempli de bouchons de bouteilles et de petits morceaux de plastique, » explique M. Brilliant. « Ils ont aussi un bon odorat, et les matières organiques s’attachent aux articles en plastique. Lorsque les algues et d’autres planctons sont en efflorescence dans l’océan, le plastique prend l’odeur de leurs sources de nourriture et les oiseaux y sont attirés. »

Les albatros vivant sur l’atoll de Kure au milieu de l’océan Pacifique entre l’Amérique du Nord et l’Asie ont un atroce voisin : le vortex de déchets du Pacifique. Les chercheurs croient que ces oiseaux consomment le plastique lié aux œufs de poissons. Ce plastique peut remplir leur estomac et lacérer leurs intestins.

Chaque année, 500 000 petits albatros sont nés et, chaque année, environ 200 000 de ceux-ci meurent. Contrairement aux tortues luths, les albatros peuvent régurgiter le plastique, mais c’est particulièrement difficile pour les oisillons, raison pour laquelle près de la moitié n’atteignent pas la maturité.

Importance des nécropsies

Parfois, lorsque des déchets marins pénètrent le système d’un animal, c’est fatal. Toutefois, il peut être utile de suivre et de récupérer ces animaux à des fins de nécropsie, c’est-à-dire d’autopsie animale.

Les nécropsies sont essentielles pour les chercheurs, puisqu’elles leur permettent d’examiner le contenu de l’animal, y compris le contenu de l’estomac. Les chercheurs peuvent donc déterminer les types de déchets que consomment les animaux et leur nuisent.

« Les animaux meurent pour toutes sortes de raisons. C’est donc important de savoir quand nous sommes la cause de cette mort, » dit Sean Brilliant. « C’est tellement difficile d’apprendre des choses à propos de ces animaux lorsqu’ils sont dans l’océan. Les nécropsies nous renseignent énormément. »

Les réseaux d’intervention régionaux qui composent l’Alliance canadienne des réseaux d'urgence pour les mammifères marins pratiquent souvent des nécropsies sur les animaux marins morts qu’ils trouvent afin d’acquérir de précieuses connaissances. Ils recueillent des échantillons biologiques et des mesures et examinent les carcasses pour des preuves d’activités humaines.

Les nécropsies du fulmar boréal sont particulièrement utiles. Cet oiseau de mer qui vit sur la côte de la Colombie-Britannique se nourrit uniquement en haute mer. Ainsi, il est une excellente source d’information sur les déchets marins qu’on retrouve dans l’océan. Une étude de l’Université de la Colombie-Britannique menée en 2012 révélait que 92,5 pour cent des estomacs des 67 oiseaux terrestres étudiés contenaient des matières plastiques.

Ces chiffres ne feront qu’augmenter. On prévoit que 99 pour cent des oiseaux marins auront consommé du plastique d’ici 2050. Des recherches supplémentaires sont requises et les comportements humains doivent changer si l’on veut que les animaux marins aient la chance de survivre.