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Nos plus belles années



April Overall

Votre grand père vous a déjà fait la leçon : « Tu as la vie trop facile, petit freluquet. Lorsque j’avais ton âge, je devais grimper des collines en parcourant 10 kilomètres à pied dans la neige, tout simplement pour me rendre à l’école! » Puisque nous n’avons qu’à franchir le pas de la porte de nos maisons de banlieue pour accéder aux commodités de la vie moderne, cette idée peut nous sembler exotique. Pourtant, nous devrions peut être faire une pause et suivre l’exemple de nos aînés. Au cours des 70 dernières années, la population a remplacé la marche et le tramway par l’automobile, puis elle a quitté la ville pour emménager dans les banlieues. Motivé par l’attrait du gain rapide, l’étalement urbain, tendance innocente en apparence, prend le paysage du Canada en otage.  

Un tramway nommé Désir

À l’époque des années 1930, les gens habitaient généralement à un saut de voiture de tramway du travail, des magasins et de l’école. Le tramway électrique constituait le moyen de transport de prédilection. Il filait dans toute la ville, et plus rapidement que les autobus d’aujourd’hui. Les habitants de la campagne prenaient l’interurbain, tramway dont l’itinéraire prenait naissance dans les rues de la ville, mais qui accédait à la campagne en empruntant des voies séparées. Il atteignait une vitesse plus élevée que celle ayant cours sur nos autoroutes actuelles. La vie était belle.

Si j’avais un char, ça changerait ma vie…

Il reste que les constructeurs d’automobiles et les distributeurs d’essence n’étaient pas de cet avis. Les villes feraient-elles de la place au tramway ainsi qu’à l’automobile? Ces sociétés n’en croyaient rien. Aux États Unis, les distributeurs d’essence et les constructeurs d’automobiles ont racheté les réseaux de tramways pour remplacer ces véhicules par des autobus, qui étaient fabriqués par les constructeurs d’automobiles. À cette époque, il était impossible de racheter les transports en commun au Canada, puisqu’ils étaient de propriété publique. Cependant, ces mêmes sociétés ont exercé une pression telle sur les gouvernements qu’on a retiré les voies de tramways des rues pour y laisser déferler les autobus (fabriqués, bien entendu, par les constructeurs d’automobiles).

Les voitures ont suivi ce modèle. Tandis que les citoyens savouraient une mobilité indépendante acquise de fraîche date, les banlieues ont explosé. À l’heure actuelle, plus de 51 % des Canadiens habitent dans les régions urbaines en constante expansion du Lower Mainland et du sud de l’île de Vancouver, en Colombie Britannique, du Golden Horseshoe, en périphérie de Toronto, du corridor d’Edmonton-Calgary et du Grand Montréal. Entre 1996 et 2001, ces régions ont enregistré une expansion de 7,6 %, tandis que le reste du pays n’a affiché qu’une croissance de 0,5 %. 

Dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’urbanisme s’est articulé autour de l’automobile. Étant donné que les rues étroites ne pouvaient plus accueillir le nombre imposant de voitures qui les inondaient, les villes ont élargi leurs routes et rétréci leurs trottoirs, créé des rues à sens unique, interdit le stationnement dans les rues pendant les heures d’achalandage et construit des parcs de stationnement. Qui plus est, des ingénieurs de la circulation ont suggéré aux villes de construire des autoroutes à accès limité, dont la 401 en Ontario, afin d’accélérer le déménagement de la population urbaine dans les banlieues voisines. À l’heure actuelle, nos routes, nos routes express et nos autoroutes occupent approximativement cinq fois la superficie de terrain dont nous aurions besoin pour assurer le transport en commun.

Ainsi est né l’étalement urbain, en raison du développement de faible densité causé par une expansion irresponsable au delà des grands centres.

Le prix à payer pour faire concurrence aux voisins

Étant donné que des hordes de résidents affluent vers les banlieues, les villes doivent procéder à l’aménagement et à l’entretien de réseaux d’égout et d’alimentation en eau, assurer la disponibilité du gaz naturel et de l’électricité, et offrir des services de recyclage et de ramassage des déchets solides sur de longues distances. Qui plus est, la navette quotidienne entre la banlieue et la ville entraîne l’émission de combustibles fossiles qui polluent l’atmosphère et contribuent au changement climatique.  

Un pays en phase de réchauffement

Les transports produisent environ 25 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) responsables du changement climatique. Près des deux tiers des gaz provenant des voitures et des camions sont émis en milieu urbain. Plus les villes prennent de l’expansion, plus elles font grimper les concentrations de GES.  

En eaux troubles

Lorsque les collectivités suburbaines, les parcs de stationnement, les voies d’accès, les routes, les pelouses et les canalisations d’égout remplacent les forêts, l’eau de pluie ne peut pas s’infiltrer dans le sol afin de renouveler les aquifères des eaux souterraines. Par conséquent, elle s’accumule sur les surfaces pavées et produit des ruissellements. Selon le Natural Resources Defense Council des États Unis, les parcs de stationnement génèrent environ 16 fois plus d’écoulements de surface que les champs. En outre, ces eaux de ruissellement sont souvent remplies de toutes sortes de substances chimiques dangereuses, dont le pétrole et la graisse, qui s’écoulent dans les égouts et, en définitive, dans les rivières, les lacs et les océans de notre pays. Tous ces produits chimiques créent des bouleversements considérables au sein des habitats aquatiques, en les transformant et en allant même jusqu’à les détruire. Depuis la colonisation européenne, le développement urbain a effectivement détruit près de 80 % des zones humides de l’Ontario.

Une faune en perte d’habitat

L’étalement urbain pose la plus grande menace aux forêts et aux zones humides voisinant nos villes. Avant la colonisation européenne, le sud de l’Ontario était constitué de forêts dans une proportion de 90 %. En raison de l’étalement urbain, cependant, à peine 20 % de la même superficie est recouverte de forêts. Les routes que nous construisons fragmentent l’habitat. Elles modifient les interactions entre les prédateurs et leurs proies et favorisent la venue d’espèces envahissantes dans de nouveaux territoires. Qui plus est, si le développement urbain accroît le nombre d’habitats destinés aux humains, il prive d’autres espèces de leur habitat, les obligeant ainsi à s’adapter à l’habitat humain.

Tandis que chute la population de certaines espèces, en compromettant l’étendue de la diversité génétique, d’autres espèces rares ou en voie de disparition sont continuellement menacées d’extinction. Selon Environnement Canada, près de la moitié des espèces menacées ou en voie de disparition du Canada vivent dans le corridor Québec Windsor, à l’instar de près de la moitié de la population canadienne. Y a t il assez de place pour nous tous? Pas si nous continuons de construire…